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Du nouveau à propos de la Cigogne blanche Porrentruy

La Cigogne blanche «Porrentruy» a commencé sa migration postnuptiale le 9 août dernier. Elle est partie de Fredenbeck, village allemand situé à environ 65 km à l’ouest de Hambourg. Elle était arrivée dans cette région le 14 juillet après un long périple qui la menée du Portugal en Moselle, où elle a échoué dans sa tentative de nidification.

Un parcours atypique


En principe, lorsqu’un couple de cigognes perd sa progéniture, il reste quelque temps sur le site de nidification, revenant fréquemment sur son nid en journée ou pour y passer la nuit. «Porrentruy» n’a pas eu ce comportement-là. Elle est partie le 23 mai de Nolette (Somme) pour se rendre vers Hornoy-le-Bourg (Somme), à 60 km au sud-est, puis elle a volée jusqu’à Honfleur (Calvados), à 150 km à l’ouest. De là, elle s’est rendue sur la presqu’île du Cotentin, dans le Parc Naturel Régional des Marais du Bessin et du Cotentin. Le 27 mai, on la localise 190 km plus à l’ouest, à Barneville-Carteret (Manche). Elle séjourne dans la région de Marchésieux puis de Bayeux jusqu’au 5 juin puis revient d’une traite, le même jour, dans sa zone de nidification, après un vol de 300 km !

Parcours-Porrentruy-08.2020
Carte des déplacements de la Cigogne blanche «Porrentruy » du 14 mars au 12 août 2020.


«Porrentruy» ne tient pas en place


Une dizaine de jours plus tard, après avoir fait une escapade aller et retour à Dannes, plein nord,
du 11 au 13 juin, notre cigogne décide de partir au nord-est. Elle effectue un vol de 15 km vers Arry (Somme), puis de 80 km pour atteindre Wittes (Pas-de-Calais). Le 16 juin, elle continue sa route et atteint Klein Willebroek (Belgique), village situé au bord de la rivière Rupel, affluent de l’Escaut, après un vol de 200 km au nord-est. Le lendemain, elle remonte de cours de la rivière Nète jusqu’à Walem. De là, elle effectue un vol de 120 km au nord-est pour atteindre, le 17 juin, la région de Elsout, aux Pays-Bas.

Le 19 juin, elle continue son périple. Elle vole 140 km au nord-est et arrive près de Oldebroek, à l’est d’Amsterdam. Le lendemain, elle poursuit son voyage. Elle séjourne à Yde (Pays-Bas), après une étape de 120 km au nord-est, puis on la retrouve le 21 juin à Wittmund (Basse-Saxe, Allemagne) après un nouveau vol de 140 km. Le 22 juin, elle change de cap et descend 90 km au sud-est vers Hude (Oldenburg). Elle remonte ensuite le cours de la Weser, jusqu’à Intscheide, 70 km au sud-est. Le 25 juin, elle séjourne entre Verden et Blender puis s’envole le 27 juin. Elle se pose à 150 km au nord-est, près de Boizenburg, non loin de l’Elbe. De là, elle repart le 28 juin et effectue une grande boucle autour de Hambourg, l’amenant successivement au bord du lac de Schaal (40 km au nord-est), à la réserve naturelle « Niendorf-Bernstorffer Binnensee » (80 km au nord-ouest), puis dans la région de Tensfeld (80 km au nord-ouest). Le 10 juillet, la cigogne «Porrentruy» atteint le Cap Nord de son périple, en étant localisée dans un champ près de Bornöved (Segeberg) (54° 03’ 29’’ N, 10° 12’ 49’’ E), à 950 km au nord-est de sa ville natale.

Le 11 juillet, elle quitte la zone et part en direction du sud-ouest. Elle s’arrête à Quickborn (Pinneberg), 60 km au sud-ouest, puis traverse l’Elbe pour stationner jusqu’au 8 août dans la région de Heinbockel, à 65 km à l’ouest de Hambourg.

 

Trois observations fort probables, mais non certifiées de la Cigogne blanche «Porrentruy»


La Cigogne «Porrentruy», après son départ d’Ajoie le 6 août 2017, indique sa présence par l’émission d’un signal capté par satellite. Il est donc possible de la localiser tous les jours entre 1 et 3 fois, à 8h, 16h et 0h. Grâce aux données recueillies, il a été possible de suivre tous ses déplacements à travers l’Europe jusqu’à ce jour.

1re observation
Au printemps 2019, avec mon épouse, je me suis rendu au Portugal pour tenter d’observer notre cigogne en période de nidification. Grâce aux données satellites, nous avons pu suivre exactement tous ses déplacements, depuis la plaine de Courtedoux, en Ajoie, jusqu’au Portugal, en passant par la France et l’Espagne. Sur place, dans les marais de Lisbonne où la donnaient les signaux satellites, nous avons pu voir qu’elle se trouvait dans un groupe de 28 cigognes. Malheureusement, le groupe se nourrissait dans des rizières privées, non accessibles en véhicule. Nous ne pouvions pas nous approcher à pieds sans que le groupe s’envole, car les oiseaux étaient très farouches. Nous avons donc dû nous contenter de savoir qu’elle était présente, mais sans pouvoir le certifier par la photographie de sa balise ou de sa bague et la lecture de son numéro de bague.

2e observation
Au printemps 2020, la Cigogne «Porrentruy» a terminé sa migration prénuptiale en s’arrêtant à Nolette, dans la Somme, en France, où elle a niché sur un arbre. Le responsable d’un camping proche du site de nidification, que j’ai contacté par téléphone, a pu prendre une photographie du couple sur son nid. Malheureusement, la photo a été réalisée avec un téléphone portable et sa qualité ne permet pas d’observer ni la bague, ni la balise. Comme la nidification a échoué, aucune autre photo n’a été prise.

3e observation
Le 1er août dernier, un ornithologue ajoulot, Olivier Chiquet, est en formation à Hambourg pour l’entreprise qui l’emploie. Profitant de son week-end, il décide de partir à vélo pour chercher la cigogne « Porrentruy », dont il suit régulièrement les déplacements sur le site Internet de la Fondation des marais de Damphreux (FMD). Après quelques heures d’observations le long de l’Elbe où les oiseaux d’eau, notamment les canards et les oies, lui offrent un magnifique spectacle, il parcourt la campagne parsemée de haies et de prairies humides. Il rencontre deux petits groupes de Cigognes blanches qui cherchent de la nourriture en arpentant les prairies. Avec ses jumelles, il regarde attentivement un groupe de 8 individus qui fréquente les parcelles où se trouvait «Porrentruy» les jours d’avant et constate que l’une d’elle possède une balise attachée sur le dos par une sangle noire qu’il aperçoit de temps à autre quand le vent lui soulève les plumes. Cette cigogne possède une bague noire, comme la plupart des autres membres du groupe. Elle se situe dans le périmètre d’où proviennent les données satellites transmises par la cigogne jurassienne. Pour Olivier, qui m’a contacté par téléphone, même s’il n’a pas pu lire le numéro de sa bague, il est fort probable que cette oiseau soit la cigogne «Porrentruy».

Michel Juillard
12 août 2020